Campus de Rimouski
300 Allée des Ursulines
UQAR
Rimouski
Québec, Canada
G5L 3A1
Les variations cycliques du climat terrestre contrôlent l’aire de répartition des espèces végétales. Des fluctuations plus subtiles déterminent leur organisation dans leurs enveloppes climatiques respectives. L’étude de la composition forestière historique à plusieurs échelles spatiales permet de comprendre comment les espèces interagissent et répondent aux changements climatiques. Des approches rétrospectives, dont l’étude des fossiles des sédiments lacustres ou du sol inorganique terrestre, sont utilisées à cette fin. La petite taille de certains éléments (pollen et charbons des sédiments lacustres) implique qu’ils peuvent être dispersés sur de longues distances par le vent. Ce problème spatial peut être abordé en étudiant l’ADN ancien dont la provenance se limite à l’aire du bassin versant du lac. À l’opposée, les sols inorganiques terrestres contiennent des charbons de plus grande taille qui sont déposés in situ après feu, identifiables grâce à des structures microanatomiques.
Le projet de recherche vise à étudier la dynamique historique de la limite nordique des érablières à sa transition avec la forêt boréale. Premièrement, l’analyse des charbons du sol inorganique sera employée pour reconstituer l’origine et la dynamique de l’érable à sucre à sa limite nordique. Ensuite, l’analyse de l’ADN environnemental ancien provenant de sédiments lacustres de trois lacs à la limite nordique permettra d’évaluer la présence locale historique de l’érable. Enfin, une intégration complète entre l’ADN environnemental ancien lacustre et les registres du pollen lacustre et du charbon terrestre sera effectuée.
Afin de compléter l’étude des charbons terrestres, six sites ont été disposés dans la sapinière à bouleau jaune de l’Ouest. Chaque site comporte trois placettes dans trois peuplements différents: une en haut versant d’une colline à érablière, la deuxième en bas versant de la même colline et la troisième sur un sommet adjacent sans érables. Pour la section d’ADN environnemental ancien, trois lacs seront échantillonnés: le lac Bélanger en Haute-Mauricie et les lacs Francis et Labelle en Abitibi.
Le sol organique de 20 points d’échantillonnage est prélevé sur chaque placette. Les charbons sont extraits des sols, identifiés par microanatomie et tous les érables trouvés sont datés au radiocarbone. L’analyse de l’ADN environnemental nécessite le développement d’un marqueur assez spécifique afin de pouvoir distinguer les deux espèces d’érable présentes dans la sapinière à bouleau jaune de l’Ouest (Acer rubrum, A. saccharum). Un marqueur universel additionnel sera utilisé pour déterminer la composition forestière totale. Les amplicons seront séquencés et comparés (BLAST) avec une banque de données des espèces de la forêt boréale mixte.
Les résultats préliminaires indiquent que les espèces nordiques d’érable ont subi deux phases d’abondance au courant de l’Holocène. D’abord, les érables étaient présents sporadiquement à leur limite nordique actuelle dès la déglaciation, jusqu’à environ 4000 ans avant le présent (calBP). Cette présence sporadique s’est maintenue lors de l’optimum thermique Holocène entre 8k calBP et 6k calBP, alors que d’autres espèces tempérées ont connu une augmentation de leur abondance. L’abondance d’érable a toutefois augmenté lors du refroidissement néoglaciaire débutant à 4k calBP. On s’attend à ce que ces résultats généraux soient reflétés dans les registres d’ADN environnemental ancien.