Centre Eau Terre Environnement
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Les paysages pergélisolés sont en pleine mutation en raison du réchauffement climatique. Le nombre et la taille des mares générées par la fonte du pergélisol ont augmenté au cours des dernières années dans certaines régions nordiques. Ces écosystèmes sont d’une importance globale pour le cycle du carbone, notamment en raison de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) tel que le méthane, qui est généralement élevé dans ces petits écosystèmes aquatiques. À la source de ces émissions, le carbone préalablement stocké dans le pergélisol devient disponible à la dégradation microbienne avec le réchauffement du climat. Bien que ces écosystèmes impliquent une forte connectivité entre milieux terrestre et aquatique, particulièrement à l’échelle d’une mare, cette connectivité n’a été que très peu mesurée tant d’un point vue microbiologique que biogéochimique. Ainsi, mon projet de doctorat s’intéresse à la manière dont la connectivité avec le milieu terrestre influence ces processus.
L’objectif principal de cette thèse est de caractériser les relations entre les communautés microbienne du sol, du réseau hydrographique et des mares, ainsi que leurs influences le transport de nutriments, la qualité et la biodisponibilité de la matière organique (MO). La grande diversité de ces environnements implique une grande variabilité de la diversité microbienne, capable de mobiliser différentes sources de carbone et de modifier les MO complexes. Ces transformations et la production de composés microbiens en amont peut stimuler et diversifier l’activité microbienne en aval. Le bilan carbone de ces paysages peut varier selon l’activité et le type de communauté, influencés par les substrats disponibles et les conditions environnementales. Il est également important de mieux comprendre les différences d’âges du carbone utilisé par les communautés, car différentes sources de carbone ont différentes incidences sur le bilan de GES et sur la pertinence climatique de ces émissions.
Un premier site d’études se trouve sur l’île Bylot au Nunavut, Canada dans le parc national Sirmilik (BI). Le pergélisol est continu et on y trouve une grande diversité de systèmes aquatiques plus ou moins influencés par le dégel et l’érosion du pergélisol, ou par la croissance des plantes aquatiques. De nombreuses études limnologiques ont été réalisées à ce site depuis 2005 et contribueront à forger le projet actuel. L’autre site d’étude se trouve à la limite sud du pergélisol discontinu, près de Whapmagoostui-Kuujjuarapik au Nunavik (SAS), Quebec, Canada. Ici le pergélisol est fortement dégradé et pourrait représenter un bon modèle sur les processus microbiens qui pourront survenir plus au Nord dans le futur. Plusieurs études ont également été réalisées au site de SAS, qui offre une richesse d’information sur la composition des communautés microbiennes, mais peu sur l’âge du C émis, l’interaction avec le cycle de l’azote, et l’importance des processus se produisant en amont.
Un des intérêts principaux est d’étudier les changements dans la diversité et le métabolisme des communautés microbiennes le long du réseau d’écoulement hydrographique entre le sol et les mares (à petite échelle sur le paysage). Divers types de continuum sol-eau seront étudiés, sur des distances de plus en plus grande. Les changements dans la composition et la labilité de MO, dans la concentration des nutriments et dans le transport des microorganismes lors de ces évènements, seront étudiés, notamment par l’ultrafiltration de l’eau en différentes classes de taille et par l’étude de la composition isotopique de la MO. L’âge du carbone minéralisé des compartiments sera obtenu par datation au 14C. Les techniques de génomique seront utilisées pour identifier les communautés le long des gradients sols-eaux des deux sites d’étude, incluant certains marqueurs génétiques mais également la métagénomique permettant de caractériser les principales voies métaboliques le long de ce continuum.
Une richesse variable dans les communautés microbiennes est attendue entre les deux sites de même qu’au sein de chacun de ces sites suivant l’importance de la connectivité avec les sols environnants, l’hydrologie. La colonisation par les plantes aquatiques et terrestres nouvelles peut ainsi modifier la qualité de la MO. Ainsi une grande diversité de processus peut être attendu selon les continuum étudiés. Le transport de MO facilement accessible et de microorganismes du sol déjà adaptés, favorise ainsi l’émission de GES en aval. L’influx de nutriment peut également stimuler l’activité microbienne dans les mares, et déterminer le type de communautés, et influer sur les cycles biogéochimiques du carbone et de l’azote. L’export de MO récente, peut permettre l’émission de CO2 plus récent et contribuer dans une moindre mesure au potentiel de réchauffement de ces systèmes. Par ailleurs, l’érosion provoquée par le ruissèlement pourrait permettre l’accessibilité à du carbone plus ancien.