Pavillon Alexandre-Vachon
1045 avenue de la Médecine
Université Laval
Québec
Québec, Canada
G1V 0A6
8193427773
david.bolduc.6@ulaval.ca
Les fluctuations d'abondance (ou cycles) de petits rongeurs, dont les populations peuvent soudainement croître au centuple avant de s'effondrer, fascinent les écologistes depuis près d'un siècle. Les impacts de telles fluctuations se font ressentir à travers les écosystèmes. Les prédateurs de ces rongeurs se reproduisent abondamment, les proies alternatives de ces mêmes prédateurs ont un certain répit et ainsi l'ensemble des relations entre les espèces s'en trouve modifié. Toutefois, les causes de ces fluctuations restent nébuleuses. Les petits mustélidés (belettes, hermines) sont considérés comme de potentiels agents causals de ces cycles. Les lemmings, dans le Haut-Arctique canadien, présentent d'importantes fluctuations d'abondances. Nous ne savons cependant presque rien sur l'hermine, seul petit mustélidé présent en ces latitudes.
Notre objectif consiste à établir si l’hermine présente des fluctuations d’abondances similaires à celles des lemmings et à comprendre l’impact de la prédation par les hermines sur la population de lemmings. Globalement, ces résultats nous permettront de mieux saisir le potentiel qu’à ce petit mustélidé à maintenir les lemmings à faible abondance et à causer les cycles.
L’aire d’étude (73°08’N, 80°00’W) se trouve dans la vallée Qarlikturvik de l’île Bylot, au Nunavut, une des nombreuses îles composant l’archipel Arctique canadien. On y retrouve deux espèces de lemmings (Lemmus trimucronatus & Dicrostonyx groenlandicus), une colonie estivale d’oies de neiges (Chen caerulescens), de nombreux limicoles, des prédateurs terrestres résidents (renard arctique, Vulpes lagopus, et l’hermine, Mustela erminea) ainsi que de nombreux prédateurs aviaires nomades.
La série temporelle des densités estivales de lemmings a été construite en premier lieu avec du trappage mortel systématique fait de 1993 à 2003 puis de 2004 jusqu’à aujourd’hui, par un trappage vivant. Leur abondance hivernale est estimée depuis 2007 grâce à un suivi des nids d’hivers. Ils sont facilement repérables au printemps et peuvent fournir des informations sur leur reproduction, leur répartition et la prédation par l’hermine. Depuis 2007, l’abondance estivale d’hermines est obtenue grâce aux d’observations opportunistes faites sur le terrain. L’abondance hivernale est tirée du nombre de nids de lemmings portant des signes de prédation par l’hermine. Pour avoir une idée des allées et venues de l’hermine avant 2007, des sondages sont envoyés aux biologistes ayant travaillé à Bylot. Les questions portent principalement sur l’observation d’hermines et les résultats nous permettront de mieux comprendre comment la présence d’hermine peut affecter les populations de lemmings.
Les hermines étant des prédateurs spécialistes dont la reproduction et la survie dépendent presque entièrement des lemmings et dont la dynamique est cyclique au Groenland et dans l’Est du Canada, nous anticipons que, à Bylot, la population des hermines sera cyclique. Nous nous attendons aussi à ce que la densité relative d’hermines soit dépendante, sans délai, de l’abondance de lemmings. Nous nous attendons à ce que le taux de croissance hivernal des lemmings soit influencé négativement par la prédation réalisée par l’hermine. De la même manière, il est attendu que la prédation par l’hermine aura un effet négatif sur la densité printanière des populations de lemmings.
Bolduc, D., Fauteux, D., Bharucha, É., Trudeau, J.-M., Legagneux, P., 2022. Ultra-light photosensor collars to monitor Arctic lemming activity. Animal Biotelemetry, 10(31): 1-9. DOI: 10.1186/s40317-022-00302-1.
Bolduc, D., Fauteux, D., Gagnon, C.-A., Gauthier, G., Bêty, J., Legagneux, P., 2022. Testimonials to reconstruct past abundances of wildlife populations. Basic and Applied Ecology. DOI: 10.1016/j.baae.2022.11.005.