Pavillon Alexandre-Vachon
1045 avenue de la Médecine
Université Laval
Québec
Québec, Canada
G1V 0A6
En Arctique, les récents réchauffements devancent la période de pousse des plantes. Certains herbivores, telle l’oie des neiges, peuvent devancer leur reproduction lors d'années hâtives, mais cette réponse aux changements est-elle suffisante pour enrayer une possible désynchronisation entre le pic des ressources et la croissance des jeunes? La situation est complexe, car les décisions de reproduction des oies dépendent de multiples paramètres: si elles peuvent ajuster la date d’initiation de reproduction selon les conditions rencontrées en Arctique, leurs décisions de migration vont dépendre des conditions environnementales rencontrées des milliers de kilomètres plus au sud. Alors qu'il est établi que la condition corporelle printanière, les décisions de migration et les décisions de reproduction sont reliées, il reste à démontrer si les changements climatiques modifient ces relations et augmentent le risque d’un décalage phénologique chez cette espèce.
Mon projet vise donc à comprendre comment des migrateurs de longue distance répondent aux changements actuels et si cette réponse est adaptative. Les objectifs sont les suivants:
La grande oie des neiges hiverne le long de la côte est américaine et utilise les battures et champs agricoles bordant le fleuve Saint-Laurent comme halte d’alimentation en période migratoire au printemps et à l’automne. Durant ces haltes, des femelles sont capturées et baguées puis suivies par biotélémétrie sur leur territoire de nidification à l’île Bylot, où la colonie d’oies abrite 20% de la population nicheuse canadienne. Cette colonie bénéficie d’un programme de suivi depuis plus de 30 ans.
Afin de mesurer les changements phénologiques de la migration de l'oie des neiges, nous disposons des dates de départ des territoires d’alimentation au Québec et d’arrivée à la colonie en Arctique de différents individus au cours des 20 dernières années. Les dates de migrations sont obtenues à l’aide de balises émettrices VHF pour trois périodes différentes : 1997-1999 (N=75), 2007-2008 (N=27) et 2019-2020 (~ 10 individus par année). Pour déterminer les conséquences des changements phénologiques sur les décisions de reproduction des individus, je comparerai les effets directs et indirects du climat, des ressources (pic de qualité des plantes) ou de la chasse sur les dates de migration, de ponte et d'éclosion des oies, ainsi que leurs nombres d’œufs pondus et succès reproducteur.
Du fait de la grande distance qui sépare les haltes migratoires et les sites de reproduction, il est peu probable qu’un changement phénologique majeur dans la migration des oies se soit produit au cours des 20 dernières années. Ainsi, du fait de l’augmentation rapide des températures en Arctique, le décalage phénologique avec le pic des ressources devrait s’accentuer, menant à des décisions de reproduction moins optimales. Ce projet permettra d'éclairer les mécanismes impliqués et les conséquences d’un décalage phénologique des oiseaux migrants sur de longues distances.
LeTourneux, F., Grandmont, T., Dulude-de Broin, F., Martin, M.-C., Lefebvre, J., Kato, A., Bêty, J., Gauthier, G., Legagneux, P., 2021. COVID19-induced reduction in human disturbance enhances fattening of an overabundant goose species. Biological Conservation, 255, 108968. DOI: 10.1016/j.biocon.2021.108968.