Pavillon Paul-Comtois
2425 rue de l'Agriculture
Université Laval
Québec
Québec, Canada
G1V 0A6
De vastes zones dans la région des sables bitumineux du nord de l'Alberta sont utilisées pour l'extraction in situ du bitume dans les couches profondes des tourbières boréales. La superficie affectée par l’extraction des sables bitumineux couvre environ 895 km2. En collaboration avec les sociétés pétrolières et gazières, le gouvernement de l'Alberta travaille à établir des critères de restauration efficace de ces tourbières perturbées.
Des pratiques de forage in situ sont nécessaires pour extraire les ressources fossiles de bitume qui sont situées dans de grandes profondeurs, car les méthodes d'extraction à ciel ouvert sont impossibles dans la région des sables bitumineux. Des plateformes minières de de près de 1 ha sont installées au sein de divers complexes de tourbières. Dans les secteurs avec une couche superficielle de tourbe de moins de 40 cm de tourbe organique, la couche de tourbe de surface est généralement extraite avant l'installation du remblai de la plateforme du puits d’extraction. Le remblai est composé d'argile de plusieurs centimètres d'épaisseur. Dans les secteurs où la surface est composée de tourbe organique sur plus de 40 cm d‘épaisseur, les arbres et les arbustes sont transformés en copeaux (paillis) pour créer une surface plane, qui est recouverte d'un géotextile et d'un remblai d'argile d’environ 1,5 m. Un drainage de la berme et de la digue assure la stabilité et la fonctionnalité du puits pendant la période d'extraction.
Après la cessation des activités minières, la restauration écologique de ces secteurs perturbés doit être assurée par les opérateurs miniers. Le processus de remise en état de ces tourbières dans la région boréale de l'Alberta est relativement nouveau. Une première restauration réussie d'un puits dans les sables bitumineux de l'Athabasca a eu lieu en 2008. Une restauration efficace considère la tourbière restaurée comme un écosystème autonome. Les règles et les critères pour une restauration réussie sont constamment développés et testés.
En collaboration avec le Boreal Research Institute du Northern Alberta Institute of Technology (NAIT), un centre de recherche situé à Peace River dans le nord de l'Alberta, ce projet de doctorat vise à : 1) évaluer le succès de la restauration de l’écosystème et 2) évaluer l’efficacité des critères de succès du gouvernement provincial pour le rétablissement des fonctions des tourbières. Le projet sera réalisé dans le contexte de l'enlèvement du remblai utilisé pour la construction des plateformes de forage des sables bitumineux dans la région boréale du nord de l'Alberta. Deux sites d'étude ont été sélectionnés, soit celui de Peace River (CNRL Peace River) et celui de Cold Lake (Imperial Oil Cold Lake).
Le puits «H38» de Cold Lake est situé dans un complexe de tourbières riches en arbustes et en arbres avec une épaisseur de tourbe organique de plus de 40 cm. Différents traitements de restauration ont été testés à ce site: Dans un secteur, le remblai d'argile et le géotextile sous-jacent ont été complètement enlevés, alors que dans un autre secteur, le remblai d'argile a été seulement partiellement enlevé, une couche d'argile et le géotextile sont demeurés sur la tourbe. Dans les deux secteurs, une végétation composée de carex (Carex sp.) a été introduite dans l'année suivant le retrait de l'argile.
Le puits «Skeg No. 12» de Peace River est situé dans un complexe de tourbières arborées. Ce site n'a jamais été utilisé finalement pour l'extraction du bitume. La plateforme d'argile est toujours présente; seule une bande de 30 m de largeur a été partiellement enlevée et utilisée pour des expériences de plantations végétales entreprises par la Southern Illinois University. Cette partie, avec de la végétation introduite sur le remblai d'argile, sert maintenant de secteur de recherche pour ce projet de doctorat. La végétation introduite comprend différentes espèces de saules (Salix sp.), d'épinettes noires (Picea mariana), de mélèzes (Larix laricina) et différentes espèces de plantes graminoïdes, telles que des carex.
Les recherches entreprises pour ce projet de doctorat portent sur différentes fonctions des écosystèmes de tourbières. Dans chaque secteurs de traitement des deux sites, ainsi que dans les tourbières naturelles adjacentes, les travaux suivants sont menés: mesure des gaz à effet de serre, y compris les flux de dioxyde de carbone (CO2) et de méthane (CH4); prise de relevés de végétation selon les différentes strates, y compris toutes les plantes vasculaires et les bryophytes, évaluation des taux de décomposition par l’utilisation de sacs de décomposition contenant du matériel végétal enfouis dans le sol, mesure de la productivité de la végétation et prise d’échantillons d’eau et de tourbe pour analyses chimiques. Toutes les données recueillies permettront de relier la régénération de la végétation et les émissions de gaz à effet de serre au rétablissement des fonctions écosystémiques des tourbières (notamment l’accumulation du carbone) et aux progrès de la restauration. Nous pourrons ensuite déterminer des critères de restauration pour ces types de tourbières perturbées.
Cette recherche améliorera la compréhension des processus impliqués dans la restauration des tourbières après des activités minières in situ et aidera à déterminer les critères de restauration des tourbières dans la région des sables bitumineux de l'Alberta.
Lemmer, M., Xu, B., Strack, M., Rochefort, L., 2022. Reestablishment of peatland vegetation following surface leveling of decommissioned in situ oil mining infrastructures. Restoration Ecology(published online 2022-04-28), e13714. DOI: 10.1111/rec.13714.
Lemmer, M., Rochefort, L., Strack, M., 2020. Greenhouse gas emissions dynamics in restored fens after in-situ oil sands well pad disturbances of Canadian boreal peatlands. Frontiers in Earth Science, 8, 557943. DOI: 10.3389/feart.2020.557943.